Amy Fraenkel
Secrétaire exécutif de la Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la faune sauvage (CMS)

Financement de la conservation de la vie sauvage : Investir dans l'humanité et la planète
La Convention sur la conservation des espèces migratrices appartenant à la vie sauvage (CMS) est le seul traité mondial des Nations Unies dédié à la conservation des espèces migratrices et de leurs habitats. Un financement suffisant et fiable est absolument essentiel pour mener à bien notre mandat.
Les espèces migratrices sont une composante essentielle des écosystèmes sains et fonctionnels. Elles pollinisent les plantes, dispersent les graines, régulent les populations de parasites et de maladies, entretiennent les prairies et contribuent même à la régulation des environnements marins et d’eau douce. Dans de nombreuses cultures, ces espèces revêtent une importance symbolique profonde et font partie intégrante du patrimoine et des traditions locales. Elles apportent également de nombreux bénéfices encore méconnus, notamment en matière d’atténuation et de résilience face au changement climatique.
Les déplacements transfrontaliers réguliers des espèces migratrices illustrent l’interconnexion de la planète et soulignent la nécessité d’un financement qui transcende les frontières nationales.
Un financement solide de la conservation génère des bénéfices économiques en créant des emplois et des revenus, renforce la sécurité alimentaire et soutient les moyens de subsistance dans des secteurs tels que l’agriculture, le tourisme et la pêche. Investir dans la faune migratrice est un choix économiquement rationnel.
Cependant, obtenir des investissements pour la conservation de la faune sauvage peut être difficile face à de nombreuses priorités concurrentes. De plus, certains gouvernements manquent de ressources pour atteindre les objectifs mondiaux de conservation. Mobiliser les 824 milliards USD estimés nécessaires chaque année pour protéger et restaurer la nature représente une opportunité majeure d’innovation, de collaboration et de finance transformatrice.
Pour faire face aux menaces croissantes pesant sur les espèces migratrices – telles que la perte d’habitat, la surexploitation, le changement climatique et la pollution – tous les outils financiers disponibles doivent être mobilisés : échanges de dettes contre nature, crédits pour la biodiversité, financements mixtes ou encore obligations vertes. Parallèlement, les subventions néfastes pour la nature doivent être supprimées et les économies ainsi réalisées réaffectées à des initiatives bénéfiques.
Au fil des années, la CMS a démontré que des financements efficaces pour la conservation produisent des résultats concrets. Au Kazakhstan, des fonds provenant du gouvernement national, de donateurs internationaux et de subventions d’ONG ont permis de renforcer la lutte contre le braconnage et la protection des habitats du Saïga. En conséquence, la population de Saïgas est passée d’environ 20 000 à 30 000 individus au début des années 2000 à plus d’un million aujourd’hui. Leur rétablissement a également favorisé la restauration des habitats et des paysages qui contribuent à l’approvisionnement en eau, à l’équilibre de la végétation et offrent des haltes indispensables à des millions d’oiseaux d’eau migrateurs chaque année.
Investir dans la conservation des espèces migratrices, c’est investir dans un avenir résilient pour les populations et la planète. Ensemble, nous pouvons garantir que ces magnifiques animaux poursuivent leurs voyages à travers le monde, maintenant ainsi l’équilibre fragile de la vie dont nous dépendons tous.